Ubuntu

De Mac à Linux, épisode 2 : Les dix premiers jours.

Par David Dufresne, 23 décembre 2016 | 21922 Lectures

La boite du Dell XPS 13 Developer— c’est à dire avec Ubuntu 16.04 installé dessus, sans une trace de Windows dedans — est arrivée par le facteur. Impessions de déjà vu, du design à la Apple, jusque dans le carton. Le cordon d’alimentation est triste, il n’y pas de MagSafe façon Cupertino (ces branchements qui se défont automatiquement plutôt que de faire tomber la bécane). De tout façon, la Pomme a aussi abandonné cette grande idée sur ses toutes dernières machines, achevant son retour en arrière.

Le reste, de la bombe. A prix bien inférieur, une puissance bien supérieure. Pas un bruit de ventilo, un clavier souple, un écran 3200 x 1800 qui change la vie et la vue.

Mais on n’est pas là pour parler matériel... Mais usage.

Premier lancement...

Tout marche, tout est reconnu : clavier, pavé, écran multitouch, tout sauf le wifi. Je relance, ça marche. Mystère.

Parce que mon clavier est un Franco-Anglais, Québec oblige (je vis à Montréal), je suis un peu perdu au début. J’accuse de grosses pertes : le « è » , le « ç » et autre « à » ne sont pas disposés en direct sur le clavier lui-même. J’apprends qu’on peut « mapper » le clavier comme on veut et retrouver les touches manquantes sans problème. Le plus important, quand on vient de 20 ans de Mac, est de se rappeler que Pomme-machin est devenu CTRL-machin. En une journée, c’est acquis.

Par défaut, c’est l’environnement Unity qui est proposé par Ubuntu. Un peu d’explications :

  • Linux, c’est le noyau du système d’exploitation, la matrice de tout.
  • Ubuntu, une collection de logiciels qui va tourner sur votre machine (appelée la distribution)
  • Puis viennent les environnements graphiques (le Bureau, etc). Ubuntu en propose des dizaines.1.

Ou pour reprendre le commentaire, ci dessous, de Stéphane :

  • Linux est le chef d’orchestre (l’ensemble des pilotes, ce qui permet aux différents matériels de communiquer entre eux et avec l’extérieur).
  • La distribution (ici Ubuntu) est l’orchestre (l’ensemble des logiciels utilisables, leur mise en cohérence, dont la manière de les installer/désinstaller).
  • Et on pourrait voir l’environnement de bureau comme le décor et le mobilier de la salle de concert.

Il existe des milliers de discussions sur les vertus de tel ou tel enviromment. Unity, par son approche à la fois grand public et commerciale, est loin de faire l’unanimité. De mon point de vue, Unity est surtout d’une laideur achevée — mais je précise à nouveau ici que mon témoignage est à prendre pour ce qu’il est : une déclaration d’amour d’un linuxien béotien, toute remarque et précision sont les bienvenues, je peux fort bien multiplier les approximations…

Première décision : changer d’environnement graphique

J’opte pour Ubuntu Gnome qui offre à mes yeux tout un tas d’avantages. Et le premier : une nouvelle facon de penser l’interface homme-machine ; ou du moins, notre relation avec le bureau de nos ordinateurs. Gnome appelle ça les « activités » et renforce le focus application par application. Pas bien sûr d’avoir encore compris toutes ses subtilités mais le charme opère. En grand. En très grand. Car quitte à changer de système d’exploitation, autant le faire à fond. Repenser cet outil que j’utilise dix heures par jour. Et pas simplement essayer de retrouver mes marques (ma marque ?) d’avant. A ce titre, amusant de voir combien Mac OS X reste tout de même une sacrée référence dans certaines discussions entre linuxiens. Reproduire l’allure du système d’exploitation Mac Os sur un Ubuntu est même un jeu d’enfant (mais, je le répète : pour moi, c’est non — je change et je change tout).

Autres délices de Gnome, ses extensions à n’en plus finir, autant des widgets délicieux, ses thèmes graphiques plus léchés les uns que les autres, ses jeux d’icônes qui font oublier — ouf — les windowseries qui trainent ici ou là sur certaines variantes Linux.

Les deux premiers jours, c’est l’extase

Un sentiment immédiat de liberté vertigineuse. Une nouvelle peau, sincèrement. De l’aide instantanée sur les forums, des encouragements sans cesse (une pluie de commentaires en ce sens à mon précédent article).

On se sent fort. On se sent libéré. On a terrassé le démon.

...Et on fait ses premières conneries

Excès de confiance, je commence à vouloir changer ceci, à modifier cela — sans bien comprendre le plus souvent ce que je fais. Vertiges des lignes de commande, Sudo superstar (Sudo pour Substitute User DO, « faire en se substituant à l’utilisateur » ou aussi Super-User Do, le super utilisateur qui peut tout faire). En deux jours, mon Ubuntu fait n’importe quoi. Ou plus exactement : je lui fais faire n’importe quoi. J’ai foncé tête baissée et c’est le mur. Le pire, c’est qu’il marche encore, pas comme je voudrais, mais il est marche. C’est du solide, Linux. Et je précise : c’est bien parce que je fouille dans le moteur que je le fais caler. Si je m’étais contenté de la version proposée de base, tout aurait marché aux petits oignons.

Je hante alors les forums, pose mille questions, reçois des centaines de pistes. La confiance renait, puis retombe, la mauvaise humeur guette, et le bonheur revient. Mais je dois m’y résoudre : j’ai dû réinstaller Ubuntu plusieurs fois, procéder par de multiples essais et erreurs avant d’arriver à mes fins :

  • Le bureau que je voulais.
  • Un établi qui me ressemble.

Ce que je retiens

  • Préparer sa migration est essentiel. Je pensais que lire de la doc un mois en amont serait suffisant. Dans mon cas, ce fut trop court.
  • Prendre son temps est une obligation. La liberté infinie de Linux a un prix : notre propre responsabilité.
  • Attendre qu’une astuce soit vérifiée avant de l’employer, tant qu’on n’a pas les compétences, est mère de sûreté.
  • S’attendre à ne pas pouvoir basculer d’un coup de son Mac à son Linux : beaucoup d’apprentissages à faire, d’habitudes à se défaire, de découvertes à accomplir et aussi de deuils sont au rendez-vous.

La suite, bientôt. A vous de jouer.

Le feuilleton de Mac à Linux

Épisode 4 : démolition totale (et bilan final) Épisode 3 : une véritable (é)migration. Épisode 2 : les dix premiers jours. Épisode 1 : parce qu’il n’y a pas d’alternative.

1Pour un rapide tout d’horizon, tout est là : https://doc.ubuntu-fr.org/debutant

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Messages

  • Félicitations ! J’ai suivi le même parcours il y a quelques temps déjà... mais moins téméraire, j’ai opté pour une longue période de transition en installant un dual-boot Ubuntu/MacOS X sur mon ancien macbook... Au bout de quelques mois, je ne démarrai plus la session MacOS X et utilisais exclusivement Ubuntu... j’étais prêt. J’ai revendu le Macbook et pu m’acheter un beau portable Asus qui tourne du feu de dieu :-) J’ai quand même mis de longs mois à m’habituer à ces étranges logiciels Gimp, Inkscape et autres Scribus, mais finalement, on s’y fait et bricoler une image sous Photoshop aujourd’hui serait une vraie gageure...

  • hé hé ! Exactement dans le même temps, moi windowsien de 20 ans et linuxien d’adoption depuis 5 ans, je me retrouve avec un MacBook air entre les mains avec pour mission « de savoir faire aussi bien qu’avec les autres OS pour pouvoir conseiller les clients quelque soit leur système »...
    ...et bien outre le fait que je hurle chaque fois qu’Apple m’impose le passage par ses fourches caudines (créer un « Apple id » rien que pour avoir accès aux mises à jour des logiciels ??? mais même Bill Gates n’avait pas osé me faire un coup comme ça !), contrairement à ce que m’ont toujours affirmé les groupies de la pomme, rien n’est trivial depuis la déconcertante disposition du clavier jusqu’aux paramétrages du réseau en passant par l’installation de mes logiciels (open-source) préférés (et indispensables) !
    Bref, la science des IHM a encore une marge de progression énorme devant elle et pour l’instant la seule chose vraiment ubiquiste entre les différents OS reste la ligne de commande...

    Voir en ligne : http://gamuza.fr

  • Encourageant ! Je me demande David, si je ne vais pas faire pareil.

    Parce que de toute façon je dois en passer par un dual boot. Mon vieux tracteur-traceur n’est plus reconnu par le dernier OS et Epson ne fera rien pour remédier à cela.

    Et pas question de m’en séparer. Il a imprimé sans faillir trois mille cent cinquante (3 150) mètres linéaires de photographies. Pas de bourrages papier, pas de bavures. Rien. Jamais. Des cartouches origines vendues en occase à un prix ridicule. Des tirages magnifiques pour peu qu’on sache la calibrer.

    Sa remplaçante, tellement plus mieux si l’on écoute les sirènes du marketing, coûte 5000 balles et fait des caprices de diva tous les 4 matin. Le patron de la chaine de magasin photo qui me l’a vendue pour se procurer la nouvelle, (tellement plus mieux), me demande comment elle va avec des trémolos dans la voie avant d’enchaîner une longue litanie de plaintes sur la nouvelle (tellement plus mieux), qu’il a déjà dû changer deux fois.

    Alors non merci.

    Du coup je suis de nouveau tenté par un multiboot. Ma suite Adobe pro pour le taf sur un boot. Mes traceurs et une version logiciel de Toshop (je ne connais pas mieux pour affiner des tirages) sur un autre. Et tout le reste en Ubuntu.

    Après tout, si j’organise mon flux de travail, c’est peut-être jouable. Surtout avec la vitesse de boot SSD/I7 quad core/32 giga de RAM et tout le reste...

    Je vais réfléchir.

    • prendre son temps est une obligation. La liberté infinie de Linux a un prix : notre propre responsabilité.

    Oh que c’est bien dit !

    Bonne balade dans l’univers libre :)

    Voir en ligne : https://www.dadall.info

  • Defricheur Ubuntu, donc, ça sonne bien comme des chaînes qui tombent

    J’y pense bien à ces alternatives, mais pas geek pour un sous, (vivement des tutos et autres forums pour des Apple’s babies) quitter ces engrenages d’achats serviles, ces addictions esthétiques et bien pratiques aussi.

    Alors, trouver une autre voie peut-être, via des échange de services. Les geeks cherchent sans doute aussi qu’on leur donne la main sur des points qui leur sont étrangers. Vous décrivez vos démarches, mais nous n’avons pas tous l’esprit des Shivas de l’informatique et un couteau suisse (tuto & Co open source) de suffit pas toujours ? Vous connaissez-vous des réseaux d’échanges de services de ce type ? Chez les écureuils de la Spip mondial peut-être ?

    J’y pensais aussi pour cet ersatz de doudou pour grands enfants, l’iphone, s’alléger, moins l’allumer pour d’autres flammes ...voire même en changer, mais pour quel objet, utile tout de même et avec quelles configurations, ...et opérateurs. mes Iphones, 3x en 5 ans, épargné par l’obsolescence programmée, « renouvèlement » pour cause de vol....et rebelotte pour cette période festive !

    Vous envisagez aussi ce changement, un dys de téléphone mobile ? Un morceau à tailler au printemps sur votre nouvel établi ?

    Je vais suivre vos avancées, espérant trouver d’autres chemins de traverse vers ce nouvel Atlantide universel à cultiver, du rêve à faire, soi-même, et à plusieurs.

  • Linux, c’est la liberté. Avec des limites mais aussi des possibilités en plus ! Il faut accepter de perdre certaines choses mais de gagner sur d’autres : pas d’antivirus, un besoin = un truc ou astuce ou un logiciel, des solutions à tout... ou presque.... Mon conseil ? Même pour un débutant, apprendre à installer en partionnant son home.... et réinstaller Linux en 15 min tout neuf et tout beau sans perdre aucune donnée ni aucun paramétrage programme.... c’est tellement magique....

    • Je vais regarder comment faire :-) Tu n’es pas le premier à me le dire... Merci !

    • Ma procédure basée sur ma récente expérience cumulée :

      • faire un backup des données perso (/home)
      • regarder avec GPARTED la structure actuelle des partitions (comment est installé / , /boot et /swap)
      • réinstaller Linux en modifiant la table de partition : * en conservant la partition /BOOT et en lui réattribuant les mêmes paramètres que vus précédemment avec GPARDED * en conservant la partition /swap et en lui réattribuant les mêmes paramètres que vus précédemment avec GPARDED * en divisant la partition *restante* entre un / (que on formatera de la même manière que vue sur GPARTED) et en lui attribuant 20 GB * le reste de la partition (selon le disque dur : 470 GB ou plus) ira sur /home (que on formatera de la même manière que vue sur GPARTED)

      Réimplanter le backup du home.... Et c’est fini. Une saine lecture de https://doc.ubuntu-fr.org/tutoriel/partitionner_manuellement_avec_installateur_ubuntu complétera ces informations.

      Bonne ré-install.

    • Merci infiniment ! Je vais tester ca au plus vite :-) J’ai toute de même quelques doutes : ou s’installent les app et leur préférences ? Comment être sûr de les embarquer dans la partition /home ? Merci d’avance !

    • La magie est là :

      • une fois la partition /home faite, les données relatives aux programmes s’y installent (disons les préférences, les fichiers récents....).
      • les programmes restent installés sur /
      • pour aller plus vite après la réinstallation éventuelle de / pour réinstaller les programmes, c’est de faire une sauvegarde de la liste des programmes installés : sous MINT, programme sauvegarde, puis sauvegarder la liste des programmes.
    • Une petite question...

      Pourquoi ceci ?

      « en divisant la partition *restante* entre un / (que on formatera de la même manière que vue sur GPARTED) et en lui attribuant 20 GB »

      Comme j’ai juste un SSD, je voudrais pas perdre trop de place :-) À quoi sert ce / ?

      Merci encore !

    • salut,

      / sert à installer le système opératif (dans notre cas, UBUNTU ou LINUX MINT). Si tu crées aussi une partition /home, tu sépares ton système opératif de toutes tes données personnelles. Ainsi, en cas de crash de UBUNTU, ou instabilité ou mise à jour système, on choisit de réinstaller UBUNTU sur / en le formatant et en lui indiquant la partition /home (que on ne formatera pas alors). UBUNTU repart alors directement et va chercher ses données sur /home. Il n’est donc plus nécessaire d’avoir à restaurer le backup de données personnelles et on gagne facilement de très nombreuses heures ainsi ainsi que de nombreuses manipulations, ainsi que de la sérénité d’esprit. Pour l’espace mémoire, à ma connaissance, UBUNTU/LINUX MINT s’installe en 5GB sur /. Pour ne jamais avoir de problème, et comme j’ai un disque de 1 TB, j’ai alloué 30 GB pour moi (25 pour mon fils sur 500 GB, 15 pour ma fille sur 60 GB...) De conséquence, il me reste environ 970 Gb pour mes données, 480 pour mon fils et 45 pour ma fille pour /home. A toi de voir l’évaluation de l’espace mémoire que tu veux pour ton /home. Mais, je ne pense pas que la partition / influence grandement. Quel est ton espace mémoire sur ton SSD ?

    • Lumineux !

      J’ai 256 Gigas sur mon SSD Tu allouerais combien ?

      Merci !

  • Bonjour, C’est très plaisant à lire ces témoignages sur ton passage d’un système à l’autre, vivement les prochains ! :)

    Petite question : Qu’est-ce que GNU !? (il n’en est pas fait mention lorsque tu parles du noyau, de la distribution et des environnements graphiques)

    • GNU (GNU ’s not UNIX ) est un projet de système d’exploitation composé exclusivement de logiciels libres. Lancé par Richard Stallman, ce système se veut compatible avec UNIX . Actuellement, le projet GNU a permis de développer de très nombreux outils de base du système d’exploitation, mais le noyau, GNU Hurd n’est pas encore pleinement fonctionnel : les outils GNU sont donc souvent utilisés avec le noyau Linux, formant un système GNU/Linux.

  • Si je peux me permettre une petite correction, il faut voir la « distribution » (ici Ubuntu) comme une « collection » de logiciels plutôt que comme une « variante » de Linux. En filant une métaphore, Linux est le chef d’orchestre (l’ensemble des pilotes, ce qui permet aux différents matériels de communiquer entre eux et avec l’extérieur). La distribution est l’orchestre (l’ensemble des logiciels utilisables, leur mise en cohérence, dont la manière de les installers/désinstaller). Et on pourrait voir l’environnement de bureau comme le mobilier de la salle de concert par exemple.

  • J’apprécie tes commentaires et ta façon de faire vivre le libre. Enthousiasmant !

    Ça me rappelle le temps où j’ai eu l’occasion de te fréquenter au PP. Que du bonheur et la chance de t’avoir côtoyé.

    Au plaisir

    Voir en ligne : http://blog-libre.org

  • Bonjour,

    Belle aventure qui me donne envie de réessayer de convertir tous mes collègues à Linux. Lors de ma dernière tentative (2009) la difficulté résidait dans les « drivers » inexistant (ou pas facile à trouver) pour plein de matériels absolument inutiles (imprimante, scanner, photocopieuse) ou des logiciels obligatoires dans le métier qui ne fonctionnait que sous WINDAUBE ou MACé.

    Je sens que les prochaines réunions d’associés vont être animées....

    Mais cela fait une belle résolution.

    A bientôt

  • Et si vous voulez essayer un bureau plus classique, MATE est très bien intégré dans Linux Mint : http://www.numopen.fr/documentation

    Voir en ligne : http://www.numopen.fr

  • Cela dépend de ton utilisation de ton /home : si tu *télécharges* beaucoup ou bien fais de la photo (comme moi), 256 GM ne sont pas grand chose :-). Ce n’est pas UBUNTU qui va te prendre de la place et ton problème est la taille de ton petit disque. En ce sens, je créerais un / de 15GB (ou même 10 GB si tu y tiens). Cela te laisse pour /home de 241 à 246 GB.

  • Bonjour à toutes et tous,

    Suite (et fin ?) de cette migration (réussie) : http://www.davduf.net/du-mac-a-linux-episode-4-demolition-totale-et

    Merci de votre soutien ! David

netManiaks

De Mac à Linux, épisode 1 : Parce qu’il n’y a pas d’alternative.

En route !