Notes de lecture

L’Ethique des hackers

Par David Dufresne, 3 septembre 2013 | 4764 Lectures

Notre monde a été bouleversé par une histoire à la con, une histoire de trains électriques, dans une salle du Massachusetts Institute of Technology de Boston, à la fin des années 50. Autour de la table et de la maquette miniature, il y avait des passionnés sans intérêt ; c’est sous la table du Tech Model Railroad Club que la révolution était en marche : des chenapans bidouillaient tout ce qu’ils pouvaient pour faire avancer au mieux ces maudits trains électriques. Ils appelaient ça s’occuper du système. En 515 pages, le journaliste américain Steven Levy raconte leur histoire - qui a mal fini. L’histoire des premiers hackers, des cablages nocturnes dans des salles réservées du MIT, des visionnaires qui s’intéressaient assez peu aux études et beaucoup aux gros machins de chez IBM, des gars qui, en quelques mois, allaient jeter les fondations de notre culture : l’information doit être libre ; le partage, total ; la décentralisation, à son maximum ; et le refus de l’autorité, permanente.

« L’accés aux ordinateurs - et à tout ce qui peut nous apprendre quelque chose sur la marche du monde - doit être total et sans restriction »

Hackers : Heroes of the Computer Revolution de Steven Levy (futur red chef de Wired) a été écrit en 1984, et ça se sent, tant le livre est parfois daté, une temporalité qui fait à la fois son charme et son ennui. Traduit impeccablement par Gilles Tordjman, la somme est enfin disponible en français, sous le titre L’Éthique des hackers.

Ici, les ordinateurs ronflent sur un étage, sont affublés de noms oubliés comme le TX-O, PDP-1, PDP-6, coûtent trois millions de dollars pièce, et des gamins (parfois de 12 ans) se font un malin plaisir à détourner machines et monde en marche.

Ici, Steve Jobs tient en deux fois trois lignes ; quand son comparse, le vrai bidouilleur, Steve Wozniak prend des pages. Ici, Bill Gates apparait déjà, alors que Windows n’est pas encore en germe, pour ce qu’il est : le vilain camarade de classe. Et on croise avec délectation tous les autres, les cancres, ceux des années 50/60, les bidouilleurs de téléphone genre Capitaine Crunch, les fantômes des premiers meetings de hackers dans les années 60, les dingos du Homebrew Computer Club dans les années 70, l’industrie du jeu vidéo naissante des années 80 où les fondateurs des premières compagnies ne se font pas la guerre économique mais se retrouvent dans un rade du coin, sous le nom de la Fraternité. A un moment, l’auteur écrit que cette révolution pacifique née dans les Sixties fut la seule, finalement, à triompher. En mettant son temps, en se faisant discrète.

« Défiez le pouvoir - Défendez la décentralisation »

Puis, tout se délite, au tournant des années 80. C’est là l’histoire qui finit mal, le fric qui reprend ses mâchoires ; les bidouilleurs qui cèdent leur royaume à des hommes d’affaires ; les petites trahisons et les grands départs.

Demeure cette utopie en marche, ces ombres dans les nuits bostoniennes puis californiennes, cette histoire d’individus dont certains sont aujourd’hui probablement disparus, ou mourants. Une histoire dont on sent bien, à coups de Prism et d’Anonymous, de logiciels libres et d’Internet partout, qu’il nous revient d’être à la hauteur ; chacun comme il peut.

« On peut créer de l’art et de la beauté avec un ordinateur. »

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Messages

  • Décidément, il faut que je le lise. Mais ça finit pas si mal. Il y a une suite à l’histoire. Le monde open source et hacker grouille de partout !

  • Bonjour, ah je suis un grand nostalgique de cet âge d’or ! On bidouillait pour le plaisir, pour déconner, pour faire des trucs ensemble, ou juste pour faire avancer le schimblick mais jamais au grand jamais en pensant à faire du fric, à créer sa petite startup pour exploiter ses futurs employés… Allez déchaînez-vous ! Et comme dit le proverbe Zen : « Ce jour est un bon jour. » Bon vent ! Michel

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